Invention/design-regards croisés
Depuis le début du mois de juin et jusqu’à mars 2016, le Musée des Arts et Métiers accueille une nouvelle exposition : Invention/design – regards croisés. Elaborée avec les Sismo, studio de design et d’innovation, cette exposition regroupe une centaine d’objets illustrant le lien entre invention et design.
Pour le visiteur, il s’agit de découvrir et de comprendre le développement des objets, depuis leur création première jusqu’aux modèles les plus récents, que ce soit le vélo, de compétition ou pliable, l’autocuiseur, celui de nos grand-mères ou celui connecté en bluetooth, ou encore les ampoules électriques à incandescence aujourd’hui dépassées par les LED.
C’est ainsi qu’en parcourant l’exposition, d’objet en objet, on comprend ce qu’est le design : bien plus qu’une simple recherche esthétique, c’est une réflexion intelligente visant à améliorer les usages et répondant à des contraintes, qu’elles soient de forme, de style, géographiques, économiques ou encore techniques… Les objets, choisis dans les collections du musée, sont quotidiens – des biens de consommation, ou industriels – des outils techniques ; ils sont décoratifs ou pratiques, simples ou à la pointe des innovations.
L’exposition est organisée autour de quatre notions : l’essentiel, l’audace, la curiosité, le contexte, quatre chemins clés du design.
L’essentiel, c’est la raison première du design, entendons : son « rôle ». Après l’invention, la recherche design a pour but de parfaire l’objet et d’optimiser ses performances. Pour illustrer cet essentiel, il faut voir l’évolution des hélices d’avion par exemple, qui, au fil du temps, sont devenues plus efficaces, grâce à leurs formes sans cesse corrigées et leurs matériaux renouvelés.
L’audace, le design est aussi audacieux. Désormais inextricablement liés, nouvelles technologies et design tirent profit l’un de l’autre, ouvrant des perspectives exaltantes, en se mettant au service de l’exploration par exemple. Le designer devient ainsi un concepteur-aventurier tourné vers le futur: si l’on pense encore aux fusées, dont sont présentées quelques maquettes, on imagine aussi déjà des drones sous-marin autoguidés qui serviront à dépolluer les océans…
La curiosité, elle aussi, va de paire avec l’invention car elle stimule l’imaginaire des créateurs et des designers. Ceux-ci observent et réinterprètent. C’est souvent dans la nature qu’ils puisent leurs inspirations. L’exposition l’illustre bien en présentant côte à côte les plans et dessins du Crystal Palace de Hyde Park – construit pour l’Exposition Universelle de 1851 – et les photos de nénuphars géants, leurs nervures ont en effet été reprises dans l’architecture du palais, créée par le paysagiste William Paxton. Les ailes de chauve souris sont un autre exemple, bien connu, de l’influence de la nature sur la pensée des créateurs, leur forme inspirant les ailes des premiers aéroplanes.
Les inventeurs passés influencent également les inventeurs présents. Le design d’un lustre d’ Henry Burstyn (2014), fait de disques de bois et de métal en orbite autour d’une ampoule, reproduit la forme des sphères armillaires, ces instruments scientifiques anciens permettant d’étudier le mouvement des étoiles autour de la Terre.
Le contexte : c’est à lui que le designer cherche à s’adapter. Il faut répondre à certains besoins et contraintes, chercher à apporter des solutions comme cette invention, simple mais redoutablement efficace : le « leafbed » – composé d’ éléments en carton qui peuvent tour à tour devenir table, tabouret ou lit de camps, il est utilisé lors d’urgences humanitaires.
Le design doit aussi répondre aux préoccupations de son époque: l’écologie en est une. En 1993 déjà, Philippe Stark remplaçait une grande part du plastique d’une télévision, conçue pour Saba, par du bois. D’autres inventeurs, pour développer une nouvelle technique de recyclage du plastique, se sont inspirés des machines à barbe à papa et de leur design pour souffler une nouvelle matière: le polyfloss, sorte de laine plastique.
Le design est donc une ingénieuse recherche, aux buts multiples, toujours en lien avec l’innovation et résolument tourné vers l’avenir, sans jamais pourtant se détacher du passé et de son environnement direct.